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Format : 13,5 x 21,5 cm Nombre de pages : 168
Prix : 27 € Date de parution : 1995
ISBN : 9782718607719
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Mal d’Archive
Réédition de 2008 |
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PRÉSENTATION
« Pourquoi réélaborer aujourd’hui un concept de l’archive ? Dans une seule et même configuration, à la fois technique et politique, éthique et juridique ? L’horizon de cette question, cet essai le désigne discrètement, tant son évidence brûle. Les désastres qui marquent cette fin de millénaire, ce sont aussi des archives du mal : dissimulées ou détruites, interdites, détournées, “refoulées”. Leur traitement est à la fois massif et raffiné au cours de guerres civiles ou internationales, de manipulations privées ou secrètes. On ne renonce jamais, c’est l’inconscient même, à s’approprier un pouvoir sur le document, sur sa détention, sa rétention ou son interprétation. Mais à qui revient en dernière instance l’autorité sur l’institution de l’archive ? Comment répondre des rapports entre l’aide-mémoire, l’indice, la preuve et le témoignage ? Pensons aux séismes de l’historiographie, aux bouleversements techniques dans la constitution et le traitement de tant de “dossiers”. Ne faut-il pas commencer par distinguer l’archive de ce à quoi on la réduit trop souvent, notamment l’expérience de la mémoire et le retour à l’origine, mais aussi l’archaïque et l’archéologique, le souvenir ou la fouille, bref la recherche du temps perdu ? Extériorité d’un lieu, mise en œuvre topographique d’une technique de consignation, constitution d’une instance et d’un lieu d’autorité (l’archonte, l’arkheîon, c’est-à-dire souvent l’État patriarchique ou fratriarchique), telle serait la condition de l’archive. Celle-ci ne se livre donc jamais au cours d’un acte d’anamnèse intuitive qui ressusciterait, vivante, innocente ou neutre, l’originarité d’un événement. Deux fils conducteurs s’entrelacent alors. Comme l’indique le sous-titre (“Une impression freudienne”), la psychanalyse devrait appeler une révolution au moins potentielle dans la problématique de l’archive. Elle ne privilégie pas par hasard les figures de l’empreinte et de l’imprimerie. S’installant souvent dans la scène de la fouille archéologique, son discours porte d’abord sur le stockage des “impressions” et le chiffrage des inscriptions, mais aussi sur la censure et le refoulement, la répression et la lecture des enregistrements. Encore faut-il suivre, dans le texte de Freud, les tensions, les contradictions, les apories – et des “inégalités de développement” qui sont aussi techniques et politiques. Dans une mesure à déterminer, l’institution et le projet théorique de la psychanalyse, ses représentations topiques et économiques de l’inconscient appartiennent à un moment dans l’histoire de la technique, et d’abord aux dispositifs ou aux rythmes de ce qu’on appelle confusément la “communication”. Quel avenir pour la psychanalyse à l’ère du courrier électronique, de la carte téléphonique, des multimédia et du c.d.rom ? Comment parler d’une “communication des archives” sans traiter d’abord de l’archive des “moyens de communication” ? Point d’archive sans l’espacement institué d’un lieu d’impression. Au dehors, à même quelque support, actuel ou virtuel. Que devient alors l’archive quand elle s’inscrit à même le corps dit propre ? Par exemple selon une circoncision, dans sa lettre ou dans ses figures ? Indissociable, un autre fil conducteur suit donc ici le trajet d’une discussion avec le grand historien américain du judaïsme, Yerushalmi, notamment autour de deux livres, Zakhor, histoire juive et mémoire juive et Le Moïse de Freud, Judaïsme terminable et interminable. Car une grande “question juive” traverse la psychanalyse. Celle-ci reste-t-elle une “science juive”, comme on l’a souvent dit pour l’en accuser, avant, pendant et après le nazisme ? Comment interpréter les stratégies de Freud devant un procès qui s’organisa, on le sait, dès la naissance de la psychanalyse ? On ne répondra pas à ces questions tant qu’on n’aura pas défini, “à supposer que cela soit connaissable”, rappelle Yerushalmi, ce que veut dire “juif” et ce que veut dire “science”. Avec Freud, sans Freud, parfois contre lui, Mal d’archive rappelle sans doute un symptôme, une souffrance, une passion : l’archive du mal mais aussi ce qui ruine, déporte ou emporte jusqu’au principe d’archive, à savoir le mal radical. Se lève alors infinie, hors de proportion, toujours en instance, “en mal d’archive”, l’attente sans horizon d’attente, l’impatience absolue d’un désir de mémoire. » J. D.
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